Paru dans le jeudi du 12/05/2011... Restauration de l'Eglise de Walferdange. Par Hénoké Courte.

Un bijou, un art - La rencontre

Restaurer, sauvegarder, conserver, remettre en état, restituer.

Cela fait quatre mois que des mains volent, voltigent, des corps entiers se penchent scalpels et pinceaux à la main, nez et bouche couverts de masques, accrochés aux marches de l’échafaudage scrutant et travaillant de près les murs intérieurs de l’Eglise de Walferdange.

Des mains de femmes, des mains d’hommes, ils sont une douzaine en tout venus de France, d’Italie et du Luxembourg, tous experts, artistes, artisans rigoureux, méticuleux, minutieux, passionnés, de vrais chirurgiens, des chirurgiens du beau.

Forts de leurs grandes connaissances techniques, d’une grande pratique, de beaucoup de doigté, de dextérité même, habillés d’une patience et d’un amour quasi religieux pour leur travail, les membres de l’équipe de restaurateurs se sont posés un instant tel des papillons, des abeilles travailleuses sur la place de l’Eglise de notre Commune, le temps de rendre au beau ce qui lui appartient.

Ils ont vu les couches sous-jacentes, identifié les dégradations, discerné les anciennes restaurations, déterminé le type d'intervention à mener et établi un essai qui restera cohérent sur l’ensemble de la surface du travail.

Puis munis de pinceaux, de scalpels, d’infrarouges, de microscopes, de capteur hygrométrique, de thermomètre et alliant savoir-faire traditionnel, connaissances en histoire de l'art, culture scientifique et savoir-faire moderne, ils ont consolidé, démonté, nettoyé, désinfecté, retouché, réparé et crée même certaines pièces.

C’est ainsi que les restaurateurs- artistes ont rencontré l’âme de notre belle Eglise de Walferdange et ont scellé un accord avec elle. Ils lui promirent le respect de son authenticité, ils jurèrent de lui redonner toute sa splendeur d’entant. Elle, à son tour leur révéla son histoire de plus d’un siècle et demi. Elle leur conta tout de l’architecte provincial Eberhard qui l’a conçue, de sa consécration par le Vicaire apostolique Nicolas Adames, et l’histoire de chacune de ses acquisitions.

Elle leur décrit les jeux de lumières de ses jolis vitraux et de la perte de certains d’entre eux durant la seconde guerre mondiale.

De l’artiste- peintre allemand Gerhard Lamers qui en 1903 l’habilla toute entière de si jolis motifs et à propos duquel ils furent conviés, elle leur dit vouloir leur laisser le plaisir de la découverte.

Elle leur dit munissez vous de patience écaillez au scalpel badigeonnage de chaux, couches de peinture en bâtiment celle de 1985 puis celle de 1968 et centimètre par centimètre découvrez les chefs d’œuvres cachés, faites le pèlerinage dans le temps, la longue prière et vous verrez.

Et sous les mains des artistes-restaurateurs, l’unique peinture murale d’origine de l’Eglise restée à découvert, celle de la voûte du chœur, représentant la Sainte Trinité vit de tous côtés les murs se peupler de magnifiques ouvrages.

Sortirent alors des murs, de l’arc triomphal et comme par magie des pages entières de décors disparus, des médaillons de St François, Saint Henri, de Marie Madeleine, de Saint Willibrod, de Sainte Gunigonde, de Sainte Elisabeth, de Saint Schetzelo et de Sainte Barbara des pures merveilles finement réalisées par Gerhard Lamers de Cleve et qui ravirent au plus haut point les restaurateurs.

Les pinceaux et les scalpels sont maintenant depuis quelques jours rangés, les mains ont baissé leurs ailes, échelles et échafaudages sont descendus, de la miniature on est passé au monumental restent alors que les yeux écarquillés d’émerveillement et l’âme qui jouit de l’harmonie du mariage entre l’architecture toute en courbe et la peinture pastel voulu par l’artiste.

L’Eglise est aujourd’hui heureuse, les artistes –restaurateurs aussi. Sur le visage de Chiara, Gulia, Sergio, Pierre, Clémence, Carine, Giovanna, Patrick, Nicolas et Polo se lit la douce joie des gens satisfaits du travail accompli, du contrat respecté, de la beauté rencontrée.

Notre Chapelle Sixtine fera le bonheur de tous, fidèles ou non qui viendront contempler, se recueillir, méditer ou prier. Pour les uns chaque image transmettra le message chrétien, pour les autres il s’agira de se nourrir du beau, puisque comme le dit bien Voltaire le superflu est aussi chose très nécessaire, une nourriture pour l’homme.

Tous ensembles nous retrouverons les racines indispensables à l’évolution de l’humain, notre histoire.


Hénoké Courte. (Echevine de la Commune de Walferdange)
Remerciements à Gilles Dansart, (Architecte de la Commune de Walferdange)

Photo : Jean Schaminé