«This is America», voilà ce que nous clament Olivier Ferretti et Marc Pierrard, deux artistes réunis en binôme dans l'espace du Pavillon du Centenaire à Esch-sur-Alzette. Immédiatement, l'intitulé choisi pour l'exposition nous évoque tout aussi bien le titre engagé de David Bowie que les nouvelles un brin nihilistes et vigoureusement caustiques de Thomas Day.
Une chose est sûre, l'«American Dream» prend du plomb dans l'aile. Tous les travers de l'impérialisme américain sont abordés par les deux artistes: le puritanisme, les lobbys pro-armes, la guerre, les injustices Nord-Sud, les affres de la société de consommation, la peine de mort, les sans-abri.
Bref, c'est une Amérique toute de guingois qui nous est révélée ici. Et affirmer que les deux compères ne prennent pas de gants pour montrer et dire les choses serait un doux euphémisme. En effet, c'est une exposition au vitriol qui nous est offerte avec son flot d'œuvres, d'installations et d'objets trash, gore, provocateurs et parfois même obscènes. Olivier Ferreti s'en explique : «J'ai recherché et affiché par la figuration d'un côté et l'utilisation de matières et d'objets de l'autre, les vulgarités morales et la négligence de valeurs matérielles ou transcendantes… Je suis motivé par l'analyse de l'individu et par mon action sociologique parfois même immorale sur les acteurs d'un monde en perpétuelle belligérance.»
Déliquescence
Alors, il est évident que les œuvres de l'artiste ne vont pas se diaprer de pastel. Ses compositions à la palette terne, sombre, délavé sont comme les oripeaux d'une société en déliquescence. Si nous recherchons le beau, le décoratif, l'esthétique, nous devons passer notre chemin car nous ne le trouverons pas dans cette exposition.
Marc Pierrard quant à lui n'hésite pas à jouer la carte de l'horrifique avec sa «défragmentation de gueule», toucher du doigt aux dérives pornographiques et titiller le patriotisme américain. En somme, l'ensemble quoique pléthorique et chaotique, est fondamentalement incisif et politiquement incorrect. Il ne nous reste plus qu'à espérer que l'Amérique qui a tant fait rêver retrouve son vrai visage et ne soit plus une caricature d'elle-même.
Jusqu'au 28 novembre. Pavillon du Centenaire, Esch-sur-Alzette. Ouvert du mardi au dimanche de 15h à 19h. ( par Nathalie Becker )